Un moniteur d’équitation, ci-après M.A, avait proposé ses services auprès d’un gérant d’une écurie, ci-après M.T. Les deux parties avaient souscrit plusieurs conventions de prestation de services, une sur la période du 10 novembre 2012 au 19 septembre 2013, et une nouvelle sur la période du 1er septembre 2016 à décembre 2016.

Le 12 septembre 2017, M.A saisit le Conseil de Prud’homme en demandant de requalifier la relation contractuelle qu’il entretenait avec M.T en contrat de travail, pour la période de décembre 2015 au 23 novembre 2016.

Débouté de sa demande en première instance, M.A interjette appel devant la Cour d’Appel de Toulouse.

Dans cet arrêt du 7 janvier 2022, les juges de la Cour d’Appel de Toulouse font écho à un arrêt de la chambre sociale de la Cour de Cassation du 19 décembre 2000 qui établissait les critères qui doivent être appréciés par les juges afin de qualifier une relation contractuelle en contrat de travail. 3 conditions doivent être remplies :

  • L’exécution d’un travail ;
  • Le versement d’une rémunération ;
  • Et l’existence d’un lien de subordination entre les parties.

Or, il faut noter que M.A exerçait son activité sous son statut d’autoentrepreneur

L’article L. 8221-6-1 du Code du travail définit l’autoentrepreneur comme étant « celui dont les conditions de travail sont définies exclusivement par lui-même ou par le contrat les définissant avec son donneur d’ordre ».

En application de cet article, M.A était donc soumis à une présomption simple de non salariat. Cela signifie que le contrat de travail liant M.A et M.T était présumé inexistant, à défaut de preuve contraire.

Il appartenait à M.A de prouver l’existence d’un lien de subordination juridique permanent qui le liait à M.T afin de renverser cette prétention.

Le lien de subordination peut être défini comme un état de dépendance d’une personne à l’égard d’une autre.

Cette notion a initialement été développée par la chambre sociale de la Cour de Cassation dans un arrêt du 13 novembre 1996, définissant ce lien comme étant « caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. »

En l’espèce, la Cour retient qu’il n’existe pas de lien de subordination entre M.A et M.T et donc qu’il n’existe pas de relation contractuelle salariée entre ces deux parties.

Plusieurs éléments sont retenus par les juges afin de motiver cette décision.

En premier lieu, les juges ont retenu qu’aucune dépendance économique n’est caractérisée entre M.A et l’écurie. En effet, M.A se faisait rémunérer directement par ses clients pour les coachings, déplacements en concours ou diverses activités qu’il prenait à charge d’organiser lui-même. De plus, il fixait librement ses tarifs.

En second lieu, l’auto-entrepreneur était libre dans son organisation.

La cour retient qu’aucun horaire ne lui était imposé : il s’était librement rapproché de Madame F, autre prestataire de la structure afin de coordonner leurs plannings et créneaux. M.A avait organisé ses prestations les mercredis et samedis et ajoutait, créait ou annulait ses cours sans l’intervention de Madame F ou de l’écurie. D’ailleurs, le moniteur disposait d’une clientèle propre dans d’autres structures équestres.

Enfin, les magistrats ont considéré que depuis le mois de septembre 2016, M.A assurait la gestion de l’écurie ce qui « implique une autonomie d’organisation et de décision non compatible avec une sujétion ».

Ainsi, la Cour ne peut requalifier la relation contractuelle en contrat de travail sans caractériser un lien de subordination entre les parties.

En raison du statut d’auto-entrepreneur qu’occupait le moniteur, il était autonome économiquement et dans la gestion de son travail. En conséquence, il n’était donc pas placé dans une situation de subordination salariée.

Il est intéressant de noter que la requalification en relation contractuelle n’est pas sans dangers. Bon nombre de jurisprudences requalifient l’auto-entrepreneur en salarié compte tenu du risque croissant de travail dissimulé dans le domaine équestre, qui peut donner suite à des poursuites pénales.

Auteure : Mlle Elodie MANGEZ